Retour dans le passé avec l’histoire
de la fontaine de Sabarrère ou « fontaine aux canards »
Aussi nécessaire qu’esthétique, elle demanda aux marignacais de l’époque, voici 142 ans, beaucoup de ténacité, d’intelligence, de sacrifices aussi, vu les maigres ressources de la commune, pour faire admettre le bien fondé de sa construction, par le Sous-préfet de Saint-Gaudens et le Conseil des Bâtiments Civils.
A la séance du Conseil Municipal du 12 mai 1876, Monsieur le Maire Blaise LAGAILLARDE demande :
– de ne plus différer la construction d’une fontaine publique sur la place de Sabarrère, afin d’avoir de l’eau potable pour les ménagères comme pour les bestiaux, (la commune n’a pas d’autre eau pour son alimentation que celle du ruisseau, non potable au moment des grandes pluies et de la fonte des neiges) ;
– d’autre part, en cas d’incendie, la population se trouve exposée aux plus grands désordres quand le ruisseau est à sec.
Il importe donc de prendre très vite les mesures nécessaires pour utiliser, selon le vœu unanime de la commune, les eaux de la source « de Carrau », jaillissant dans le terrain communal, pour la construction de la fontaine, conformément au devis dressé par M. BILLARD, architecte de Saint-Béat.
Monsieur le Maire propose de contracter un emprunt de 2 000 francs (environ 305 €uros de nos jours). Le Conseil Municipal vote cette proposition à l’unanimité.
On adresse le devis suivant au Conseil des Bâtiments Civils :
« captage d’une source à 525 m de la place avec réservoir de 20 m3, vasque en fonte artistique avec jet d’eau, débit de l’eau disponible : 67 litres par minute). Montant de la dépense : 7 463,16 francs ».
Le 1er septembre 1876, monsieur le Sous-préfet demande de modifier ce projet d’après les remarques suivantes (délibération du 9.11.76) :
– la vasque en fonte nous paraît un ornement inutile dans un village comme Marignac ; en la retirant, on réaliserait une économie de 700 à 800 F. ;
– la conduite est projetée en tuyaux de fonte dont nous ne voyons pas la nécessité ; on peut amener l’eau par de simples aqueducs en maçonnerie, ce qui entraînerait une économie considérable sur les 4 025 F. prévus pour fourniture de tuyaux en fonte.
La riposte ne se fit pas attendre. Voici la réponse du maire :
- – il est vrai que l’époque du jaugeage des eaux n’a pas été mentionnée : il fut fait en novembre 1875 au moment des plus basses eaux ; donc la source suffit à tous les besoins ;
- – monsieur le rapporteur du Conseil des Bâtiments nous conseille des économies que nous voudrions bien réaliser, mais il ignore les faits précédents et les conditions particulières du terrain ;
- – en 1861, nous avions dressé un projet avec des tuyaux en maçonnerie ; le Conseil des Bâtiments le repoussa en demandant des tuyaux de fonte de 7 à 8 cm avec un bassin de 20 m3 ;
- – la commune n’étant pas en mesure de supporter la dépense en abandonna le projet ; mais à la suite d’un incendie, les habitants exécutèrent par corvées volontaires les tuyaux en maçonnerie ; ceux-ci ne résistèrent pas plus de trois ans aux racines des arbres, à la lourdeur des fardeaux qu’ils devaient supporter puisqu’ils étaient sur des chemins de transports des roules.
- – Le projet que nous avons soumis a donc été établi en tenant compte de l’avis du Conseil des Bâtiments et d’une expérience pas très heureuse.
- – Pour avoir quelques chances de résister, notre aqueduc, tous calculs faits, nous coûterait plus cher que les tuyaux en fonte.
- – La suppression de la vasque économiserait de l’argent, mais amènerait le mécontentement des souscripteurs volontaires qui ont déjà versé 1 000 F. et en découragerait d’autres. Après consultation, ils ne consentent pas à modifier le projet.
- – D’autre part, la construction de la fontaine est de la plus urgente nécessité en cas d’incendie. La plus grande partie des maisons de Marignac est couverte de chaume. L’exemple récent de « Burgalays » prouve quels désastres peut provoquer un incendie.
A l’unanimité, le Conseil Municipal persiste dans le vote déjà émis. Il supplie le Conseil des Bâtiments d’émettre un avis favorable et monsieur le Sous-préfet d’autoriser l’exécution du projet.
En 1878, ce projet est en cours d’exécution.
Le 14 février 1878, le Conseil Municipal décide de verser un acompte de 1 000 F. à monsieur Victor ANDRIEU, entrepreneur des travaux de ladite fontaine et un autre de 999 F. le 15 août 1878.
Pour la façon et la pose des auges de l’abreuvoir communal de Sabarrère, le sieur Pierre BAZERQUE, tailleur de pierre, reçoit la somme de 103,60 F. le 19 janvier 1879.
A son tour, l’architecte BILLARD perçoit 244,00 F. d’honoraires le 23 mars 1879.
Fontaine « voyageuse », comme le prouvent les cartes postales, elle fut d’abord installée sur la place devant la salle de classe des garçons, près de la mairie.
Vers 1900, elle « traversa » la route et la voilà près d’une gare de tramway, qui, elle, sera démolie en 1924.
Mais pour des besoins de circulation, elle s’en fut élire domicile sur le « pré de la Poste » où elle a perdu sa vocation utilitaire, en raison du progrès.
Elle n’en fait pas moins l’admiration de tous. Son socle et son bassin sont en pierre ouvragée. La colonne centrale en fonte compte trois étages ornementés de différents motifs.
Quatre magnifiques canards assurent une première distribution d’eau, quant à la seconde entre les deux vasques, elle se fait à travers des fleurs de nénuphars et au sommet surgit un jet d’eau vertical.